Tribune : Ne rendons pas le casque obligatoire à vélo !

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Cette tribune a été initialement publiée par Rue89 Lyon : https://www.rue89lyon.fr/2022/01/23/pourquoi-principale-association-velo-lyon-est-contre-obligation-port-casque/

Victoire ! Le travail de lobbying de la Fédération des Usagers de la Bicyclette (FUB) à laquelle appartient La Ville à Vélo et la vaste mobilisation (dont celle de plusieurs dizaines d’adhérent·es de La Ville à Vélo) ont permis d’empêcher que le casque devienne obligatoire à vélo. Soutenir La Ville à Vélo, c’est aussi agir à l’échelle nationale.

Rappel du contexte : Ce 13 janvier 2022, sénatrices et sénateurs ont débattu d’une proposition de loi qui proposait de rendre obligatoire le casque à vélo. Cette proposition avait été déposée par le sénateur de la Charente François Bonneau et soutenue par une trentaine de sénatrices et sénateurs du groupe de l’Union Centriste (UC) ; elle a été retirée après la discussion générale mais avant d’être soumise au vote. Un seul amendement, proposant la suppression du texte, avait été déposé. Son exposé des motifs révèle le rôle fondamental des “organisations fédérant usagers du vélo et collectivités”, ici la FUB et le Club des Villes et Territoires Cyclables.

Cet événement est l’occasion d’expliquer pourquoi La Ville à Vélo est résolument contre l’obligation du port du casque à vélo, et pour appeler les élu·es à agir sur les causes de l’accidentalité pour atteindre 0 cycliste mort ou blessé grave.

Pourquoi rendre obligatoire le l’obligation du port du casque est contre-productif

L’Université Gustave Eiffel (ex-IFSTTAR) recense depuis 1995 l’ensemble des victimes d’accidents de la route survenus à Lyon et dans le Rhône, en collaboration avec 245services hospitaliers qui prennent en charge les blessés, qu’ils soient hospitalisés, ou uniquement traités aux urgences. Entre 2006 et 2012, les cyclistes ayant des blessures qui mettent en jeu le pronostic vital (MAIS 4+) souffrent pour 76% d’entre eux de lésions à la tête.

De plus, plusieurs études en France ou à l’étranger attestent de plus que le port du casque fait baisser la gravité des traumatismes crâniens.

Dès lors, comment expliquer le paradoxe suivant : le port du casque à l’échelle individuelle est bénéfique, en particulier dans le cadre sportif, mais il devient contre-productif lorsqu’il est rendu obligatoire ?

L’obligation du port du casque annule l’effet de sécurité par le nombre

Quand la pratique du vélo augmente, le risque d’accident diminue. Autrement dit, plus il y a de cyclistes, plus la probabilité d’être victime d’une collision diminue. L’Observatoire national interministériel de la sécurité routière explique dans son bilan 2020 que “la mortalité cycliste a baissé de 5 % entre 2019 et 2020, malgré une hausse des déplacements de l’ordre de 10 %.” Or, l’obligation du port du casque décourage la pratique du vélo, annulant ainsi l’effet de sécurité par le nombre et augmentant le risque de collision.

Graphique illustrant la pratique du vélo et le risque associé dans une sélection de pays de l’OCDE par Statista.

Les bénéfices pour la santé du vélo sont supérieurs aux risques, même sans casque

Une étude de 2012 de l’Observatoire régional de santé d’Ile-de-France a évalué que les bénéfices sur la santé de la pratique du vélo sont plus de 20 fois supérieurs aux risques encourus, et ce rapport bénéfice / risque augmente avec le nombre de cyclistes. Les auteurs indiquent :

« Ce ratio très important en faveur du vélo est essentiellement dû aux bénéfices de l’activité physique qui l’emportent largement, à la fois sur les autres bénéfices et sur l’ensemble des risques. »

Sur la métropole de Lyon, entre 54 % et 84 % de la population selon les communes marche moins de 10 minutes par jour, loin des recommandations de pratiquer au moins 30 minutes d’activité physique par jour. Pourtant, près de 2 déplacements sur 3 de la métropole de Lyon font moins de 3 km, une distance aisément réalisable à pied … ou à vélo !

Se fixer l’objectif d’atteindre 0 cycliste mort ou blessé grave

Le fait qu’une collision soit fatale ou pas dépend dans la grande majorité des cas de l’implication d’un conducteur de véhicule motorisé (65% des morts en 2020, 73% en 2019). Résultat : on constate qu’il y a la même proportion de tués parmi les victimes casquées que parmi les victimes non casquées.

Graphique montrant l’accidentologie selon le port du casque, d’après le bilan ONISR 2019, par Pol Grasland-Mongrain

Pour la sécurité des cyclistes, La Ville à Vélo demande donc à tous les élus, locaux et nationaux, d’agir sur les causes de l’accidentalité pour créer un “système sûr” et atteindre 0 cycliste mort ou blessé grave.

Ces actions, efficaces et concrètes, sont les suivantes :

  • Mailler la métropole d’aménagements cyclables sécurisés et continus
  • Généraliser la ville 30 (le 50 km/h devenant l’exception)
  • Généraliser la piétonnisation des rues devant les écoles et dans les cœurs de ville
  • Généraliser l’apprentissage obligatoire du savoir rouler à vélo au niveau Cycle 3 (CM1, CM2, 6ème) dans toutes les écoles et collèges de la métropole
  • Rendre obligatoire les dispositifs anti-angle mort pour les véhicules de grand gabarit

Hormis cette dernière mesure, elles font toutes partie des compétences des élu·es municipaux ou métropolitains.