« Monsieur Kimelfeld, la Métropole doit changer de braquet ! »
Déclaration des associations cyclistes de la Métropole de Lyon du 15 mai 2018
À Lyon, le retour du vélo urbain a été nettement amplifié dès 2005 par le déploiement des Vélo’v. Depuis bien du chemin a été parcouru. Le trafic vélo a littéralement explosé : il a été multiplié par 5 et il continue de progresser rapidement : +15% par an en moyenne entre 2010 et 2015, + 26% en 2016, + 10% en 2017. Sur certains grands axes du centre-ville, le trafic cycliste se compte en milliers (6 200 cyclistes par jour sur le cours Gambetta) et représente désormais 1/4 à 1/3 du trafic total.
Le réseau cyclable atteint une certaine maturité sur Lyon-Villeurbanne: le maillage par les grands axes est bien avancé. Il se densifie rapidement grâce à la généralisation des double sens cyclable. Il s’étend actuellement sur 800 km avec un objectif de 1000 km en 2020. Depuis 2015, le rythme de déploiement des aménagements cyclables est de plus de 70 km par an.
La culture vélo progresse au niveau des élus, des techniciens, des aménageurs, des entreprises, des médias et du grand public. Les associations représentant les usagers du vélo sont prises au sérieux et quasiment tous les projets de réaménagement de voiries prennent en compte le vélo.
Mais si nous nous comparons aux autres métropoles européennes ou même françaises, nous constatons qu’il reste beaucoup à faire pour que la Métropole de Lyon se hisse en tête du peloton des métropoles cyclables de France. En effet, la Ville de Lyon n’apparait qu’à la 5e place des villes de plus de 200 000 habitants (derrière Strasbourg, Nantes, Bordeaux et Rennes) dans le baromètre des Villes Cyclables dévoilé à l’occasion du Congrès de la FUB en mars dernier à Lyon.
Peut-être parce que la politique cyclable de Lyon n’a, jusqu’à présent, jamais été pleinement assumée par les élus…
Le temps est donc venu pour la Métropole de Lyon de faire son coming-out cycliste en assumant pleinement son choix d’encourager les déplacements à vélo pour devenir une métropole à Haute Qualité de Vie.
Cette ambition renforcée et assumée doit, à notre sens, se concrétiser par le lancement d’un Grand Plan Vélo comme à Paris, Grenoble ou Bordeaux.
Voici ce qui pourrait en constituer les lignes principales :
- Rendre les centres-villes des communes de la Métropole cyclables à 100% d’ici 2025.
Par le strict respect de l’Article L228-2 du code de l’environnement issu de la Loi sur l’Air et l’Utilisation Rationnel de l’Energie (dite « LAURE ») qui stipule qu’« à l’occasion des réalisations ou des rénovations des voies urbaines […], doivent être mis au point des itinéraires cyclables pourvus d’aménagements sous forme de pistes, marquages au sol ou couloirs indépendants […] », par la généralisation des zones 30, le développement des zones de rencontres, la généralisation des doubles sens cyclables, des sas vélos au feu, des cédez le passage cycliste au feu et du réglage à 25 ou 30 km/h des « ondes vertes » de tous les grands axes de la Métropole.
- Développer un Réseau Express Vélo.
La pratique du vélo se développe à mesure que son efficacité et le sentiment de sécurité s’accroissent. Pour cela, il faut aller plus loin que le premier point.
Un Réseau Express Vélo est à développer sur Lyon-Villeurbanne mais aussi avec et entre les communes des première et deuxième couronnes. Il s’agit d’axes larges et sécurisants : en pistes unidirectionnelles de 2 mètres de large ou bidirectionnelles de 3,5 mètres de large (permettant la circulation des véhicules de secours en cas d’urgence absolue). Il contribuera également à la résorption de coupures urbaines qui constituent de puissants freins à l’usage du vélo.
- Déployer des campagnes de communication.
Il faut encourager les grands lyonnais à se déplacer à vélo. C’est développer une culture du vélo urbain en remplacement de l’image sportive véhiculée par le tour de France : avec les vélos à assistance électrique, il n’est plus nécessaire d’être un athlète pour parcourir 10 km ou gravir les collines de Fourvière ou de la Croix Rousse, c’est à la portée du plus grand nombre.
- Renforcer une offre de stationnements encore trop hétérogène.
Imaginerait-on aujourd’hui des quartiers sans parking voiture ?
On prévoira de déployer des arceaux et des stationnements sécurisés à proximité de tous les arrêts de TC lourds (gare SNCF, métro, tramway) à proximité ou à l’intérieur des écoles, des collèges et de l’ensemble des services publics (bibliothèques, piscines, stades, gymnases,…)
- Etendre l’offre de parkings sécurisés.
Il s’agit de développer une offre de parkings sécurisés (box) pour répondre notamment aux besoins de résidents ne disposant pas d’un local vélo sécurisé dans leur immeuble – indispensable pour les propriétaires de vélo à assistance électrique (VAE).
La Métropole doit également rappeler à ses bailleurs sociaux, de déployer le programme Alvéole qui apporte des solutions au problème de stationnement dans les habitats collectifs et accompagne les habitants dans l’apprentissage du vélo.
- Développer une véritable offre de services vélos.
Cela peut prendre la forme de vélo stations, de pompes en libre-service, de services de location de vélo longue durée,… Certains grands lyonnais ont besoin d’un accompagnement « humain », c’est d’ailleurs en ce sens qu’oeuvrent certaines de nos associations.
- Convaincre le Sytral du potentiel de l’intermodalité entre transports collectifs et vélos et la développer rapidement
En périphérie, le vélo permet un accès efficace aux stations de métro et de tramway dans un rayon allant jusqu’à 5 km (10 km avec un VAE). Dans l’hyper-centre, il permet de décongestionner des transports collectifs saturés et donc de différer, voire d’éviter de coûteuses infrastructures de transport (cf. point 4).
- Soutenir les ateliers vélo existants et créer un chèque “réparation vélo”
Il est nécessaire d’aider davantage ces ateliers, qui font partie de l’économie sociale et solidaire.
Soutenir la réparation de vélo, c’est soutenir la création d’emplois non délocalisables et réduire la génération de déchets. La Clavette reprend une des propositions émises par la FUB et l’Heureux Cyclage lors des Assises de la Mobilité de décembre 2017 et propose la création par la Métropole de Lyon d’un chèque « réparation vélo » de 80 euros qui permette, notamment aux publics sociaux, d’apprendre à réparer leur vélo dans l’un des ateliers de réparation participatifs et solidaires de l’agglomération. L’apprentissage de la mécanique vélo et l’entraide y sont en effet une véritable source de lien social.
La Métropole de Lyon a également un rôle à jouer pour aider au développement de locaux adaptés, de proximité, et judicieusement répartis, qui soient mis à disposition des ateliers participatifs et solidaires de l’agglomération.
- Généraliser l’apprentissage du vélo.
En généralisant les cycles vélo dans les écoles primaires.
En soutenant les associations et les institutions qui organisent des vélo-écoles.
- Démocratiser l’usage du vélo dans les quartiers populaires.
C’est une priorité pour lutter contre la précarité de la mobilité et réduire les fractures géographiques.
Au regard, des niveaux de pollution et de bruit auxquels sont exposés les habitants de la Métropole, de l’impérieuse nécessité de réduire les émissions CO2, des engagements de la Métropole pris dans le PCAET et le plan Oxygène, de la grande efficacité du vélo pour se déplacer en milieu urbain et de son coût extrêmement faible pour la collectivité, il y a urgence à donner la priorité à ce mode de déplacement. Nous ne pouvions pas rêver mieux qu’un président cycliste pour opérer ce changement de braquet !
Les associations signataires :
FFCT, Janus, La Ville à Vélo et ses antennes locales (Caluire à Vélo, Ecully à Vélo, Francheville à Vélo, Tassin à vélo, VALVE, Villeurbanne à Vélo), Pignon sur Rue et les ateliers vélos de la Clavette (Le Chat perché, La P’tite rustine, Change de chaîne, les Bikers et Tricycles).